Chance the Rapper, l’héritier (Part 1)

chance-the-rapper-coloring-book-chicago

Pour les 2 semaines à venir, on reprend les bonnes habitudes avec un bon vieil article Rap US bien long.
Au fait, on est en Octobre. Qui dit Octobre, dit automne. Logiquement, bientôt l’hiver. Donc de longs mois d’un gris tout pourri en perspective. Quelle merde ce principe des 4 saisons franchement.
C’est aussi la période où l’on commence à sortir nos antidotes personnels contre la déprime. Certains ont des recettes de grand-mères, d’autres se mettent en mode hibernation. Julien s’en bat les couilles puisqu’il fait beau chez lui, à Singapour, et Baptiste profite de l’ensoleillement annuel offert par Marseille. Mais personnellement, j’ai un remède un peu particulier pour affronter la triste période qui se profile : la discographie de Chance the Rapper.
C’est parti pour botter le cul à la grisaille en 2 temps. Chapitre 1.

chance-the-rappper-smiling
C’est parti. © Prospect

Le commencement

Chance the Rapper. Rien que le fait de prononcer ce nom me donne le smile. Le gars s’est pas pris la tête : c’est sobre et efficace, bien qu’un peu chelou pour un nom de scène. Disons que t’as pas intérêt à te prendre trop au sérieux quand tu choisis de te faire appeler comme ça.

Derrière ce pseudo brillamment trouvé se cache Chancelor Jonathan Bennett, un jeune artiste d’à peine 23 ans originaire de Chicago. Un gamin presque normal de la classe moyenne Américaine, qui prenait soin de son petit frère Taylor pendant que le papa travaillait et soutenait pour Barack Obama, lorsqu’il était encore sénateur dans l’Illinois.

chance-the-rapper-chicagoan-white-sox
Un vrai Chicagoan qui se respecte. © via Pitchfork

Au risque de vous décevoir, Chance n’est pas une jeune pousse du rap découverte au berceau. Il n’est pas non plus un musicien prodige, comme peut l’être Anderson .Paak et sa batterie. Le hip-hop est venu à lui, un beau jour de 2004, jour de sortie de l’album The College Dropout de Kanye West. J’en profite pour remercier Kanye pour cet album, et pour avoir changé la vie de ce p’tit gars.
Révélé par cette découverte musicale, Chano commence la musique pendant ses études supérieures, en formant un groupe d’instrumentistes avec un pote. Tout simplement.

Ce gars là fait partie de la même génération que nous, celle qui bouscule les codes et inquiète les parents par son avenir incertain. Mais ça, pour être clair, il s’en bat les couilles. Insouciant, il poursuit dans cette voie et commence à se produire dans un petit loft de la librairie centrale de Chicago.

chance-the-rapper-picture
Ça c’est un regard insouciant. Si je regarde ma mère comme ça, je me prends direct deux bouffes bien placées histoire de me réveiller. © via The Odyssey Online

C’est une sorte d’erreur de parcours qui va définitivement lancer Chano vers une carrière dans la musique. Renvoyé 10 jours de son bahut pour possession de marijuana dans le campus universitaire, il profite de ce moment de liberté pour sortir une mixtape, intitulée dans la plus grande des logiques Chancelorienne 10 Day. Sa première production trouve son public, mais vient aussi chatouiller les oreilles de médias prestigieux comme le magazine Forbes.
Les professeurs, qui ne croyaient pas en lui et qui tournaient en ridicule ses ambitions d’artiste, l’avaient dès lors bien profond là où je pense.

shocked

Note de Julien : J’ai ri.

Heureusement, ce n’était pas le cas de toutes les personnes qui l’entouraient, car Chance a toujours pu compter sur un soutien indéfectible : celui de sa famille. Il en a fait une valeur à laquelle il se tient, menant aujourd’hui aisément une vie de papa en parallèle de sa carrière musicale. Le jeune adulte peut être fier d’avoir trois femmes dans sa vie : sa petite amie Kirsten, sa fille Kinsley, et sa maman.
Il semble offrir à cette dernière un bel instant à deux dans l’introduction du morceau Everything’s Good, dans laquelle elle exprime toute la fierté qu’elle ressent pour son fils. Si vous voulez marquer le coup pour la fêtes de mères, vous savez ce qu’il vous reste à faire.

Chance the Rapper semble aujourd’hui avoir trouvé un équilibre, entre famille, foi et musique. Il n’est cependant pas du genre à oublier d’où il vient, et utilise sa notoriété naissante pour oeuvrer pour sa ville natale. Il suit donc l’exemple de son père, et devient l’un des acteurs principaux du renouveau de Chicago, comme peut l’être Kanye West depuis quelques années.
Engagé, il est aussi pour la cause de la communauté noire. Ainsi, il participe avec d’autres artistes comme Alicia Keys ou J. Cole au projet initié par Barack Obama, My Brother’s Keeper Challenge, dans le but d’accompagner les jeunes Américains de couleur vers un avenir plus coloré que cette putain de grisaille parisienne.

chance-the-rapper-chicagoans-of-the-year

Chano semble évoluer aussi vite qu’un adolescent en pleine puberté, entre responsabilité et créativité. Au delà de la musique, il s’exprime sur d’autres tableaux, comme la mode. Vous avez pu l’observer sur la dernière campagne de pub de Kenzo, celle-ci étant aussi barrée que lui. Il semble que ce garçon contamine tout ceux avec qui il collabore.

chance-the-rapper-kenzo-crazy
Voiiiiilà. © via Trends

Le monde de l’art dans son ensemble reconnait aujourd’hui le talent de Chance the Rapper. Comme si c’était écrit, Kanye West l’accompagne vers la lumière en lui offrant une place de choix sur le morceau introductif de The Life Of Pablo. Qui a dit que Desiigner était le poulain préféré de Kanye ? BULLSHIT. Ultralight Beam est une production made in Chicago, entre religion et hommages. Et Chance the Rapper ne fait que la sublimer.

La musique de Chance the Rapper

Je vous le disais en intro, la musique de Chance the Rapper donne la patate, et égaille une journée gâchée par un connard de nuage obèse devant le soleil. Chaque production est assez singulière, très inspirée musicalement. À mon sens, il s’intègre dans ce mouvement de rappeurs qui accordent une importance particulière aux instruments, pour certains assez vintage, quitte à faire passer au second plan le flow à proprement parler. Kendrick Lamar est passé maître dans cet art, lui que l’on pourrait confondre avec le narrateur omniscient d’un roman écrit à Paris dans les années 30 dans certaines de ses créations.

kendrick-lamar-black-and-white-portrait
MONSIEUR Kendrick Lamar.

En fait, on a l’impression que Chano récite son art de manière spontanée. Une spontanéité éphémère, comme si tout allait disparaitre à la fin de la chanson. Quelque soit la composition, son phrasé mélodique conte l’histoire de la vie toujours sous un aspect optimistement réaliste. Ses couplets transpirent la sincérité, dans le fond et la forme. Bref, c’est d’la bonne vibe, et ça fait du bien.

Bon, il faut quand même avouer que ce type est complètement barré, voire un poil psychédélique. On a parfois l’impression d’avoir affaire à un gamin hyperactif, à le voir gigoter comme une autruche enfarinée dans ses clips. Le rappeur de Chicago danse, chante, pousse des petits cris chelou, et fait un gros f*ck à ceux qui restent sur le bord de la piste.
Il est d’ailleurs le seul gars à rester crédible lorsqu’il se met en scène en train de nager la brasse dans le ciel, équipé des lunettes de Naruto. Pour lui, il est aussi tout à fait normal de faire un petit coucou aux passants depuis le toit du métro. La preuve en images.

Chance the Rapper fait ce qu’il veut, quand il le veut. Encore loin de lui l’idée de sortir un album solo. Ça prend du temps, il faut écrire pleins de chansons, les enregistrer, en faire la promotion… Ne vous méprenez pas, c’est un bosseur, mais il est trop jeune pour se prendre la tête avec ça.

N.B : Petit conseil entre copains ; si vous avez l’intention de sortir un album durant vos prochaines vacances d’été, évitez de le faire avec Kanye West, vous risquez d’y passer plus de temps que prévu et de rater la rentrée.

Il existe cependant une solution pour contourner tout ce laborieux travail, et c’est exactement celle qu’a choisi Chano : la mixtape. Un format court qui convient parfaitement à sa fougue juvénile et qui lui offre une certaine liberté, autant temporelle qu’artistique. Au diable les promotions et les soucis de distributions, il les met gratos sur internet, et nik le système !
Il en a donc fait son format favori, lui en ayant déjà sorti 3 à seulement 23 ans. D’ailleurs nous aussi, on va prendre le temps d’en parler un peu.

10 Day, le dépucelage

Je dois avouer que l’histoire de cette mixtape, que je vous ai déjà racontée, me fait bien tripper. C’est l’exemple même de l’utilisation de son temps à bon escient. Même si 10 jours restent courts, Chance the Rapper a réussi à produire quelque chose de plutôt cool. Soyons réalistes, j’ai du mal à trouver un fil rouge là dedans, et c’est un peu le bordel. Mais je suis très mal placé pour juger, moi qui ne suis pas foutu de jouer la plus simple des mélodies à la flûte à bec. Mais quelle idée d’apprendre ça aux collégiens aussi, c’est peut être le seul instrument qui ne donne jamais le son que l’on veut entendre, ce qui permet au passage de charcuter les créations des plus grands compositeurs.

flute-à-bec-réforme
Instrument instauré au collège dans une réforme du XVIe siècle.

Cependant, on retrouve dans cette mixtape quelques éléments assez évocateurs de l’univers de Chano, qui était donc déjà bien marqué. Je pense à sa voix si significative, qui permet de le reconnaitre aisément au milieu de la brochette d’artistes de la scène US, à la spontanéité qui transpire de ses morceaux, mais aussi à quelques petits solo de trompette que l’on retrouvera plus tard.
On peut donc dire qu’il y a de la personnalité dans cette production. Il n’a pas cherché à se faire remarquer ou à démontrer son talent. Il s’est juste éclaté à explorer différents styles, du hip-hop alternatif à la trap. Encore une fois, il fait ce qu’il aime faire.

chance-the-rapper-live
© via Billboard

À mon sens, quelques morceaux ressortent dans cette production. Celle-ci débute par une démonstration de l’efficacité de la logique Chancelorienne à travers le nom du premier titre, 14.400 Minutes, qui s’avère correspondre à 10 jours. DAMN. Quelle info de fou, personne ne s’y attendait.

En poursuivant l’écoute, on tombe sur le morceau Family, dans lequel Chano a invité son pote Vic Mensa le temps de réciter un genre d’ode à la vie. Lui qui a été spectateur d’un trop grand nombre de tragédies pour son âge en a développé une sorte de clairvoyance, qui lui permet de se recentrer sur l’essentiel : la famille, au sens large du terme.

On retrouve aussi des morceaux un brin nostalgiques, comme Long Time II, dans lequel le rappeur de Chicago regrette la simplicité des rapports de lorsqu’on est mômes, et les amis perdus par le passage à l’adolescence.

Il est temps de conclure la 1ère partie

C’est sur cette bien belle mélodie que le chapitre 1 de cette histoire se referme. Oui je sais, c’est scandaleux. Mais soyons sincères, un article trop long devient vite chiant à lire.
Vous avez juste eu le temps de découvrir un jeune gars de notre âge, simple, engagé, et fier de ses valeurs.

La semaine prochaine, on s’intéressera plus à l’artiste qu’il est, notamment en poursuivant la découverte de la musique de Chance. Je vous partagerai également mon morceau préféré dans la rubrique « J’ouvre mon petit coeur ». Cela vous laisse quelques jours pour écouter 10 Day dans son intégralité, si ces quelques extraits vous ont plu.

On dit toujours que les seconds tomes d’une trilogie sont les moins bons. Rassurez-vous, cela ne sera pas la cas au Melting Potes, puisque cet article n’est qu’en 2 parties. C’est sur cette intervention complètement conne et inutile que je vais arrêter d’écrire. Sayonara !

chance-the-rapper-live
© ootlyfe

L’image d’en-tête est empruntée à © Zoe Rain ! Et vous pouvez nous rejoindre sur Facebook et Instagram, histoire de nous encourager kwa.

Laisser un commentaire