Y-3, du créateur au consommateur

sneakers y-3

On continue notre série sur nos marques coup de cœur en s’attaquant à un très gros morceau. Y-3 est une marque sportswear de beau gosse, fruit de la collaboration de Yohji Yamamoto et d’Adidas. Bien joué. Y pour Yohji, 3 pour les 3 bandes d’Adidas, et le petit tiret pour lier les deux : « Yohji number 3 ». Si beaucoup de marques se tournent vers le sportswear élégant c’est en partie grâce à Y-3, qui a été créée en 2003. Le mec était définitivement en avance sur son temps.

Qui est Yohji Yamamoto ?

Ses débuts dans la vie

Y-3 est le fruit de la collaboration d’Adidas et de Yohji Yamamoto, comme je l’ai dit précisément. Mais c’est en grande partie l’œuvre de Yohji Yamamoto, Adidas n’est en fait que la matrice qui a permis la création de la marque en rendant possible la production des collections. Donc avant de s’intéresser à Y-3 il est bon d’en savoir un peu plus sur le génial designer japonais de 73 ans.

Première étape de sa vie, il est né. Nous avons tous été vainqueurs, même le dernier des derniers. Ben lui aussi, comme tout un chacun et malgré son génie il n’a pas trouvé d’autre solution pour commencer à vivre. Je digresse.

grece

Je reprends, il est né en 1943 à Tokyo. Il est élevé par sa mère seule, ayant perdu son père alors qu’il n’avait qu’un an. C’est d’ailleurs pour la remercier des sacrifices qu’elle a pu faire pour l’élever seule que le jeune Yojhi (c’est bizarre de le dire comme ça, j’ai l’impression de parler de Mario) travaille assidument et décroche en 1966 un diplôme de droit à l’université de Keio. Mais une fois son diplôme décroché, il refuse de rejoindre la société ordinaire et décide d’aider sa mère dans son travail.

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Yohji Yamamoto, penseur. Photo tirée du livre qui retrace les 10 ans d’Y-3.

Ses débuts dans la mode

Manque de bol, sa mère n’est pas avocate ou juriste, mais travaille en tant que couturière dans un magasin à Kabukicho, un quartier olé au lait de Tokyo. Au début la maman a un peu les boules, et c’est compréhensible pour une mère, mais elle finit par accepter. Mais à la condition qu’il intègre une école de mode, la Bunka Fashion College, maintenant connue pour avoir formé les designers Kenzo Takada, Junya Watanabe et évidemment Yohji Yamamoto. Mais à l’époque ça ressemblait plus à une école pour apprendre aux jeunes filles à être de bonnes épouses. Au programme, création de bouquets de fleurs, cuisine et couture.

Au moins il sera officiellement « bonne à marier ». Après avoir obtenu son diplôme il gagne un prix pour aller à Paris et toucher un peu à la haute couture. Sauf que, ô rage ô désespoir, sous l’impulsion de Saint Laurent, la haute couture commençait à se faire remplacer par le prêt à porter. Qu’à cela ne tienne, il contacte de nombreux magazines pour publier ses créations mais n’essuie que des refus. Il arrêta alors de dessiner, commença à boire et à jouer. Il pensait n’avoir aucun talent. Mais avant de déconner complètement il décida de retourner à Tokyo.

Le lancement de ses lignes

Et grand bien lui en a pris car c’est à Tokyo qu’il eut l’idée. Au boulot chez sa mère, il confectionnait des robes pour des femmes sublimes. Mais ces robes ne lui plaisaient pas. Ce qu’il aimait lui c’était des vêtements masculins pour femmes. Il venait de voir la lumière.

When I started making clothes for my line Y’s in 1977, all I wanted was for women to wear men’s clothes. I jumped on the idea of designing coats for women. It meant something to me – the idea of a coat guarding and hiding a woman’s body. I wanted to protect the woman’s body from something – maybe from men’s eyes or a cold wind.

En français : Quand j’ai commencé à faire des vêtements pour ma ligne (de pèche) Y’s en 1977, tout ce que je voulais c’était que les femmes portent des vêtements pour hommes. Je sautais (littéralement) sur l’idée de dessiner des manteaux pour femmes. Ça signifiait quelque chose pour moi – l’idée d’un manteau gardant et cachant le corps d’une femme. Je voulais protéger le corps de la femme de quelque chose – peut-être des yeux coquins des hommes, ou du vent froid encore plus coquin.

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Excuse my french, but this is my fuck*ng dream. Photo toujours tirée du même livre

C’est à cette époque qu’il pose les bases de toutes ses créations futures. Il commencera par dessiner pour les femmes dès 1972 dans la première collection de sa marque Y’s. Il aime bien les Y. 7 ans plus tard il débutera sa collection hommes. Dans ses créations il s’appuie sur son amour pour l’asymétrie et les palettes monochromes. Il se justifiera à ce propos en disant qu’il en a un peu ras la casquette (c’est moins vulgaire que ras le cul…) de toutes ces couleurs moches qui assaillent ses yeux en ville. Il décide de refuser de déranger nos pauvres yeux avec ces couleurs horribles, et transmet sa poésie dans la coupe du vêtement.

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Salut toi. Encore et toujours le même livre

Les années passent, les collections aussi, telles que celle apparue en 1995 : Yohji Yamamoto + Noir, qui fait la part belle aux silhouettes intemporelles… noires, évidemment. Avec ses deux principales lignes, Yohji Yamamoto et Y’s, il connait un très grand succès. Mais il y a un hic. Il ne voit personne porter ses créations, à part probablement aux très grands évènements où les gens fortunés se retrouvent. Faut dire que ses pièces coutent une blinde. Donc il décide de tenter un coup.

Parlons donc d’Y-3

Rapprocher le créateur du consommateur

Il appelle alors Adidas et leur propose de collaborer. Bien sûr, pas plus cons que d’autres, les mecs d’Adidas acceptent de suite. On est en 2003 lorsque la première collection d’Y-3 voit le jour. Et ce fut une révolution dans l’industrie de la mode. Ils inventèrent une nouvelle catégorie, qui allie l’élégance des coupes et la technicité des matières pour adapter le sportswear à la vie de tous les jours.

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La preuve en image. Tirée du même livre

On a donc une vision de l’habillement qui fait le pont entre la mode et le sportswear, tout ça portée par un designer de renom et une marque qui vend en masse. Ça ne pouvait que marcher. Y-3 a participé à rendre plus accessible aux communs des mortels des vêtements d’exception. Le fossé entre le créateur et le consommateur commença alors à se réduire, dans une volonté humaniste de la création artistique. Ceux qui pensent que l’art est destiné à une élite sont des cons. C’est accentué dans la mode, vecteur de création qui colle à notre peau, car on s’habille tous les jours askiparé.

Le futurisme élégant et fonctionnel

Les collections s’appuient sur des designs futuristes, avec le désir de démontrer l’élégance du futurisme dans la mode. Et quoi de plus adéquat que les matières techniques pour mettre en valeur l’élégance de ces coupes ? En réalité tout le cheminement est implacable, les étoiles se sont alignées pour arriver au résultat qu’on connait aujourd’hui. Yohji Yamamoto en avait marre de créer pour peu de monde. Il a remarqué que les vêtements de sport ne ressemblaient à rien. Il a souhaité révolutionner ce secteur. Il a alors créé Y-3, et a mêlé ses influences sartoriales à ses envies de futurisme. Il a inventé le tryptique technique-élégance-fonctionnel.

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Et ça donne ça. Image tirée du même endroit.

Beaucoup de marques font ça aujourd’hui, et le font très bien, à commencer par Nike ACG. Mais ceux qui nous marquent le plus sont les pionniers. Comme il le dit très bien dans le documentaire Master of The Shadows qui lui est dédié, le créateur crée des designs surprenants que les gens ne trouvent pas forcément très beau au premier regard. Mais au final ils l’aiment car ça a du sens, ça transmet quelque chose.

 

Histoire de rêver un peu, pour les 10 ans de Y-3 la marque a publié un livre qui retrace l’histoire de la marque à travers des photos. On y retrouve de tout, tel un fil instagram, sans vraiment de logique mais avec une cohérence, celle d’Y-3. La plupart des images de cet article ont été tirées de ce livre, vous l’aurez remarqué.

La mode des collaborations

La tendance actuelle voit beaucoup grandes marques mainstream s’associer avec des designers pour faire des coups commerciaux. On pense forcément à H&M qui s’associe au moins une fois par an avec un designer célèbre, et déchaine toutes les folies. Ainsi Karl Lagarfeld, Olivier Roustaing ou Alexander Wang y sont passé. Leurs collections se sont à chaque fois écoulées très rapidement et ça fait gagner beaucoup de pépettes autant à H&M qu’à la marque des designers.

Adidas a une politique un peu plus respectable car les collaborations sont réellement sur le long terme, comme en témoignent les lignes de Stella Mac Cartney et de Yohji Yamamoto, ou encore Samsonite. Samsonite est le leader mondial de la bagagerie, et c’est pas volé : les cuirs sont d’excellente qualité, extrêmement durables et ils sont à la pointe des innovations technologiques dans leur domaine. C’est ainsi que depuis 2010, Samsonite apporte chaque année son expertise pour produire la ligne de bagagerie d’Y-3. C’est pas dégueux.

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Un sac de la collection actuelle d’Y-3. Une idée de la perfection. Disponible ici.

Nos pièces coup de cœur

Enfin on passe au sérieux, allons jeter un œil à la collection d’Y-3. Spoilers : ça fait pas rire !

Pantalon cargo « Y-3 FL UTILITY CARGO PANT » (430€)

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Voila notre copain.

Bon j’aime beaucoup les cargos. Je trouve que c’est ultra pratique (pas besoin de trimballer un sac avec soi pour trimballer les trucs encombrants) et en plus c’est souvent prétexte à une coupe originale. Celui-ci ne déroge pas à la règle. La coupe est droite et l’entrejambe basse, ce qui donne une sensation de confort mêlée à l’élégance de la coupe droite.

Les poches au niveau de la jambe sont obliques et amènent la touche sportive au délire, tout comme les multiples zips. Qui bien sûr ont une gueule qui claque. Enfin la couleur et la matière du pantalon font plaisir : la texture fait penser à de la flanelle de laine. Et ça ne trompe pas puisque ce cargo est composé à 70% de laine, pour maintenir au chaud. Et les derniers 30% restant (25% polyamide, 5% autres fibres) apportent l’aspect technique à la matière.

Enfin au niveau du prix on est sur une pièce qui fait quand même assez mal. Mais aucun doute que ce pantalon est de la super came et qu’il dure des années. C’est donc une pièce qui est loin d’être une priorité, mais si un jour on a la possibilité d’investir on le peut. En sachant tout de même qu’il existe d’autres alternatives beaucoup moins chères et proposant une qualité pas loin d’être équivalente.

Note de Hans : Autant dire qu’étudiants que nous sommes, on se le met profond là où je pense.

Blazer “Y-3 TERRY MIX BLAZER” (490€)

blazer y-3
Disponible ici.

J’enchaine avec ce blazer. Là on est dans le gros délire. Niveau prix il se situe dans la fourchette normale d’un blazer haut de gamme. Mais quel kiff ça doit être d’avoir un blazer Y-3. Il n’y a pas trop de trucs à dire sur cette pièce, le seul truc qu’on est en droit d’exiger c’est qu’il soit bien confectionné et que la matière soit de qualité. De ce qu’on peut en voir la coupe a l’air nickel.

C’est un tissu éponge 100% coton. Donc ça doit garder un minimum la chaleur, et être ultra confortable. On note que le blazer est 3 boutons, ce qui prouve une inspiration un peu vintage. Mais c’est contrebalancé par l’épaule naturelle (pas de padding, donc pas de rigidité), par la matière originale, et enfin par le détail de la fermeture éclair au niveau des poignets.

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Le petit zip.

Sac à dos « Y-3 QASA S BACKPACK » (260€)

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Disponible ici.

Je finis par la pièce la plus abordable : le sac à dos. Parfaitement simple dans son design, noir et épuré. La bande élastique rajoute à l’impression de pureté du sac, dont rien ne dépasse. C’est carré, propre. Il joue sur 3 textures, au niveau du corps du sac, de la bande élastique et du renforcement dans la partie inférieure. Il contient évidemment des compartiments multimédias et de multiples poches pour y mettre tout ce que l’on veut. Encore heureux d’ailleurs.

Conclusion sur Y-3

Au final Y-3 est une marque portée par un créateur aux idées novatrices et des moyens de production énormes. Les designs sont léchés et orientés vers le minimalisme et le futurisme au service du fonctionnel. Ce qui donne des tenues magnifiques, qui laissent apparaitre une vision de la mode. Car investir autant d’argent dans ces vêtements quand on n’a pas un budget monstrueux témoigne d’une volonté de favoriser l’éthique et la création aux dépens des marques de fast-fashion. Néanmoins au vu du prix, je n’aurai probablement pas la possibilité de porter ces vêtements. Pour autant on peut apprécier un Picasso sans le posséder.

A noter que la somme des prix des trois pièces que j’ai sélectionnées est égale à 1180 €. Soit un SMIC. Mais aussi à peine 50€ de plus que le prix de l’iPhone 7 Plus 256Go. Comme quoi, investir son argent est une question de choix… Pour ne pas finir sur ces mots, je vous propose une petite sélection de photos tirées du livre des 10 ans d’Y-3.

Note de Hans : Autant dire qu’étudiants que nous sommes, l’iPhone 7 Plus 256Go, on se le met profond là où je pense.

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Photo d’en-tête ©http://www.y-3.com/FR/#/book/

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