Mac Demarco : type normal, musique unique

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Mercredi prochain (31/05/17) débutera la 17ème édition du Primavera Sound Festival à Barcelone. Cet évènement musical, considéré par beaucoup comme la Mecque de la musique indépendante présente chaque saison depuis 2001 un line up incomparable. C’est bien simple, beaucoup de fans prennent leur billet d’année en année sans même connaitre la programmation. En arriver là pour un festival, c’est pas mal quand même.
Au programme de cette édition : Bon Iver, The XX, Frank Ocean, Arcade Fire, Skepta, Metronomy, Flying Lotus et… Mac DeMarco ! C’est qui lui ? Un gars un peu chelou qui porte des salopettes sur scène et montre fièrement ses dents du bonheur ? Oui, mais pas que. Aujourd’hui on parle de l’un des artistes pop les plus WTF de sa génération qui vient de sortir 
« This Old Dog » sous Capture Tracks, son quatrième album. 

Le commencement

Made in Canada

Mac est un p’tit gars simple. Né au Canada en 1990 à Duncan, ses parents déménagent à Edmonton ou il grandit. Déjà au berceau, sa mère lui chante les Beatles. Peintre, elle achète de grandes toiles et peint des heures durant avec Mac et son frère Hank, tous deux bourrés de créativité.
Malgré une fibre artistique, il n’y a pas de musicien dans sa famille, excepté sa grand mère guitariste. C’est elle qui lui offre sa première guitare et lui distille ses premiers cours. Le bougre ne lâchera alors plus jamais son instrument.

Mac Demarco Jeune
Le genre de photo qui ne devraient pas être sur la toile. Merci Konbini…

Pas forcément fait pour les études, Mac file à Vancouver dès l’obtention de son diplôme, certainement pour la musique. En plus d’être un gars simple, Mac DeMarco est un gars discret, mais discret à sa manière. Difficile donc de trouver des éléments biographiques sur sa personne.

Ses première expériences musicales l’amènent très vite à créer son premier groupe : Makeout Videotape. Forcément, on retrouve la guitare qu’il aime tant dans des sonorités déjà pop et un son au grain particulier.
Le song writting vaut ce qu’il vaut, mais on décèle déjà une pointe de romantisme et une certaine sensibilité dans l’interprétation. En plus de l’extrait ci dessous, vous pourrez retrouver « Le Mac DeMarco d’avant » réédité via ce lien super giga trop cool. 

Premiers pas en solo

En 2011, il s’installe à Montréal pour composer ce qui sera son premier album solo. Le précédent des Makeout Videotape s’étant vendu à 500 unités, Mac est fauché. D’après sa page Wikipédia, il se serait mis à faire des tests médicaux contre rémunération, ce qui n’est pas confirmé, mais pourrait expliquer en partie sa douce folie.
Son premier opus sort et se nomme Rock And Roll Nightclub. 13 titres où le canadien prend une voix de crooner assez grave qui peut surprendre une fois qu’on le connait un minimum, car ce n’est pas son habitude.

Mac DeMarco n’est pas une rockstar, mais endosse le rôle en tant que tel. Il fait le pitre avec sa voix grave et sa guitare presque fausse. Selon ses proches, cet album ne serait qu’une vaste « joke » qui reprendrait les codes du rock 50’s 60’s 70’s 80’s et les recracherait avec dérision. Quoi qu’il en soit, c’est frais, pas parfait, et ça se laisse écouter.

Qu’il est bon cet Elvis Demarco

En 2012 sort « 2 »… son deuxième album ! Sur la pochette, en noir et blanc, Mac pose fièrement avec gratte et fait bêtement le signe 2. À moins que ce soit le signe « peace »✌. D’ailleurs,  cet album l’est tout simplement. Je le trouve même un peu chaud pour une production canadienne.

« 2 » signe le déménagement du jeune Vancouverien vers Montréal. Un déménagement progressif vers la réussite d’autre part. Cet album cultive la cool attitude, ce qui est d’autant plus génial lorsqu’on sait dans quelles conditions il a été enregistré.
Imaginez Mac DeMarco dans son petit appartement à Montréal, pratiquant le home studio, passant les trois quarts de son temps à enregistrer en caleçon, enchainant clope sur clope. Sexy hein ?

Extrait de l’album version live. 

À partir de cet instant, les médias anglo-saxons s’emparent de l’affaire. Pitchfork sort une critique fort sympathique à son sujet, The Guardian vénère le son de sa guitare et on le compare déjà à Real Estate, qui à l’époque venait de sortir Days et surfait sur son succès (quand je parle de succès, c’est à l’échelle de la musique indépendante bien sûr).

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Vous trouvez cette photo bizarre ? Elle est le début d’une belle série.

Ce début de notoriété s’explique par l’image que Mac DeMarco cultive sans même sans rendre compte.
Comme on dit chez nous : « ce mec, il est à l’arrache ».
Il se fringue dans les fripes avec des vêtements trois fois trop grands, porte des casquettes et des jeans troués aux mauvais endroits, et fait le pitre clope au bec dans ses versions acoustique. On se demande même comment il fait pour livrer une telle prestation cigarette au bout des lèvres.

Le monde est en train de découvrir un homme à l’apparence clownesque qui, une fois guitare en main, livre avec magie de belles compositions. Bon guitariste, il affectionne autant jouer accompagné qu’en solo. Ci dessous Cooking up something good en version intimiste.

« Mommy’s in the kitchen cooking up something good
And daddy’s on the sofa, pride of the neighborhood
My brother’s in the ballet, it seems he’s got it set
And I’ll be up at midnight with my cigarette »

Des paroles simples, qui parlent à tout le monde. Mac DeMarco raconte sa vie quotidienne et celle des ses proches. Derrière le jeune fou se cache déjà un song writter en devenir, l’avenir le confirmera.

De Salad Days (2014) à This Old Dog (2017) : la maturité

Salad Days débarque en guise de troisième album et lance définitivement la carrière de Mac DeMarco. Ce n’est pas mon préféré mais si on veut comprendre l’univers de l’artiste, il peut être bon de l’écouter. Mac y déploie tout son savoir faire et développe son petit monde à part.
Les synthé rétro et les guitares surf truffées de vibrato nous transportent sur de belles plages de sables fins tandis que de curieux noms de chansons tels que Pepperoni Playboy ou Potato Boy rappellent son côté loufoque et totalement décalé.

Salad Days, tube de l’album éponyme, avec un visuel fort sympathique

Si on écoute la mélodie, on se dit qu’une ligne de guitare de cette trempe et les dissonances qui en sortent casseront les oreilles des premiers auditeurs. Que neni, il y ajoute ce petit quelque chose, ce grain de nonchalance talentueux qui fait le différence. À partir de là, notre canadien préféré a son public dans la poche.

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Ce ne sont pas des plants de cannabis derrière lui, mais on pourrait en douter… ©sniffers.co

Un an plus tard sort Another One. Another album qui présage déjà un gain de maturité. Cet album se compose de 8 titres aussi bien écrits les uns que les autres, composés entre ses soirées à Brooklyn et ses tournées internationales. Les années 60 ne sont jamais loin. Comme si la plume des Beatles prônait sur les couplets avec toujours ce son de guitare si particulier et agréable à l’oreille.

Sur le titre Another One, cette douceur presque sérieuse est génialissimement opposée à un clip complétement barré dans lequel Mac se prend grossièrement pour Mickael Jackson en bord de mer.

Apparement il ne prend pas de drogue. Si si, je vous jure. 

Mac DeMarco chante le blues de la perte amoureuse de plus en plus souvent, toujours dans un esprit décalé. Plus sage et romantique, il déménage de Brooklyn vers Los Angeles et y enregistre son dernier album : This Old Dog sortit le 5 mai dernier et dont je vous parlerai un peu plus loin.

La musique de Mac DeMarco

Une guitare, une voix

Certains diront qu’il chante à moitié défoncé ou endormi, mais on ne peut pas nier la réelle technique de Mac DeMarco à la voix et à la guitare.
Personnellement, je trouve que son timbre flirt entre Paul Mccartney et Pete Doherty dans les aigus, même s’il est clairement plus juste que ce dernier. Sa voix – mais aussi sa musique – est résolument pop. Il est souvent définit comme le représentant officiel de la pop décalée.

NB : Il est aussi un des représentants majeurs de la scène pop indé actuelle. 

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Sa guitare, c’est son mythe. Il l’a acheté pour une poignée de dollars – 30 pour être exact – dans une brocante. Si elle donne l’impression de sonner faux de temps à autre, c’est normal. Mac à voulu lui donner un son unique en utiliser des effets tels que le réverbération, le delay ou le chorus pour lui donner un son unique (mais là je me répète).

Quand on lui demande d’où lui est venue cette idée et pour quelles raisons il joue encore avec (il en utilise d’autres depuis), il répond que c’était par manque d’argent à l’époque, et « qu’aucun musicien sérieux ne l’aurait jamais utilisé ».
En somme, Mac DeMarco est un bon musicien. Il peut vous faire sonner n’importe quoi et même montrer ses c****** dans les clips de ses amis.  Je m’étais promis de ne pas en parler, mais là c’est trop. Nous allons maintenant passer du côté obscur de l’artiste. Accrochez vous !

Mac DeMarco invité sur le clip de TOPS. Si je vous dis de ne pas aller directement à 1min45s pour voir ce qui s’y passe, vous n’irez pas, n’est-ce pas ? 

Une bonne dose de folie

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Je vous avais prévenu…

C’est ce genre de choses qui rendent génial Mac DeMarco. Un gars dont le succès ne monte pas à la tête. À 27 ans, il s’est fait un nom grâce à son tempérament un peu foufou et grande accessibilité.
Mac, c’est le pote avec qui tu pourrais boire des bières tous les soirs, faire le con et jouer de la musique comme il l’aime le faire. Il se définit lui même comme un type qui est « toujours partant pour passer de bons moments ».

Qu’est-ce qu’on rigole entre casquettes !

De bons moments, on peut dire qu’il en a passé. Il existe une petite compilation faite par les Inrocks qui répertorie ses plus beaux coups d’éclats. J’en connaissais quelques unes mais certaines m’ont vraiment fait triper.

Dans cette vidéo live de Still Together, Mac DeMarco invite justement sa copine à passer la fin de concert en sa compagnie. Un moment marrant et tendre à la fois bien accueilli par le public du Pitchfork Music Festival.

Parfois, on est en état de se demander ce qui se passe dans la tête de ce jeune homme. Laisser parler sa créativité est une chose, la mettre sur la toile en est une autre. Abonnez-vous à son compte Instagram, vous risquerez souvent de vous dire « Mais WTF? ».

Au fil des années et des évènements marrants qui ont fait sa réputation, certains se sont risqués à dire qu’il s’agissait simplement de coups de communication.
Je pense plutôt que Mac DeMarco ferait un super communicant (et en est probablement un). Il est juste nature et cultive le normcore style dans toute sa splendeur. Balladons-nous encore un peu sur la planète Mac DeMartienne et rigolons un bon coup.

L’animation de On The Level. Vous pouvez toujours vous amuser à cherche une signification. 

Jetez un oeil à la vidéo ci dessus. Ce personnage aux allures de Sith dans Star Wars, ses gestes bizarres et les ondes de l’eau avec en fond sa pochette d’album forment pourtant un « tout » cohérent avec la musique. Le visionnage en devient presque hypnotique.

On the level est un extrait de This Old Dog. Un album plus mûr dans lequel les guitares sont moins présentes au profit de la mélodie. Les sonorités et le chant sont plus travaillés. Avec This Old Dog, Mac DeMarco produit un réel album solo dans lequel la guitare acoustique, le synthé et les boites à rythme apportent une dimension DIY que les opus précédents offraient moins. Quelques anecdotes sur son dernier album ici.
On peut le dire, Mac DeMarco est assurément un très bon song writter. Le gros + c’est qu’en + d’être auteur compositeur, il est un formidable interprète.

Des interprétations décalées et nonchalantes, mais toujours soignées

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Voici une vidéo que j’ai visionné il y a peu, et qui m’a transporté. Elle est représentative de ce curieux personnage dont je vous parle depuis le début de l’article.
On y voit Mac DeMarco jouer en session acoustique dans un parc. Jusqu’ici rien d’exceptionnel. Il s’amuse du concept de cette chaine Youtube et en fait du Marc DeMarco.

Mais, d’un air espiègle, il déambule dans un parc, joue de la guitare sans sangle, jette des regards bienveillants aux passants et se fout des interruptions faites par les enfants, sirènes et autres bruits de la ville ambiante. Malgré tout cela, Mac livre probablement le meilleur « Take Away Show » que la blogothèque ait connu.

Still Beating et This Old Dog font partie des perles de son dernier album. Un opus marqué d’une maturité remarquable pour un chanteur de 27 ans seulement. La mélancolie et le romantisme l’emporte sur la connerie et les espiègleries. Même si on aime l’ancien Mac DeMarco, le nouveau plait également.
Ce qui est fascinant dans son approche artistique, c’est qu’il tourne souvent une action au ridicule, mais lui donne en même temps de la classe et de la prestance.

Exemple avec cet hommage WTF à Prince sorti l’année dernière, et dont le son et le cadre parfaits contrastent avec la mise en scène totalement décalée.
Pourquoi verse-t-il un mug d’eau sur la tête d’un homme cagoulée dans une baignoire à la fin du clip ? Allez savoir. On notera tout de même la performance vocale car reprendre du Prince, c’est pas donné à tout le monde.

J’écoute en boucle

Quand on aime vraiment Mac DeMarco, il y a beaucoup de chansons qu’on écoute en boucle. Pour ma part, je suis sur une moyenne de 4/5 par album ce qui est plutôt pas mal. Je ne le fais pas avec la plupart des artistes que j’écoute.
Parmi celles-ci, il y a My Old Man, une chanson issue du dernier album This Old Dog (Il se sent vieux peut être).

Pourquoi j’aime ce son ? Pour son ensemble bien sûr, mais avant tout pour l’ambiance qui s’en dégage. Sans même imaginer Mac DeMarco canadien, on se retrouve vite de l’autre côté de l’Atlantique dès l’écoute des premières notes.
Cette boucle de guitare, qui ne change d’ailleurs pas un brin tout au long du morceau, rend vite addict. Elle est le premier son que l’auditeur perçoit de l’album et c’est ce qui est génial. Personne ne s’attendait à un son « demo » de cet ordre, et encore moins à un album de cette trempe. My Old Man arrive donc à contre courant mais ne déçoit pas pour autant.

Le chant y est calme, posé et fait référence à une prise de conscience de la part du chanteur.

Look in the mirror
Who do you see?
Someone familiar
Surely not me
For it can’t be me
Look how old and cold and tired and lonely he’s become
Not until you see
There’s a price tag hanging off of having all that fun

Le Mac DeMarco actuel compose peut être plus sérieusement, mais joue toujours avec des guitares achetées 10 dollars, griffonne ses texte assis en tailleur à même le sol et joue ses mélodie au piano avec seulement deux doigts. Et c’est pour ça qu’on l’apprécie.

Il est temps de conclure

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©RoseClements

Mac DeMarco est peut être le mec qui contient le plus bonne vibes au monde. Il nous prouve qu’on peut très bien concilier l’inconciliable. Chanter l’amour en tong, sonner faux et faire danser les gens, faire rire en racontant des histoires tristes. 

Au fil de cet article je me suis rendu compte qu’au delà de son attitude sans filtre, Mac donne énormément sur scène. Il partage avec son public, comme si c’était son moteur artistique. Parler de soi, parler des autres et se tourner vers eux, n’en avoir rien à foutre et être toujours rock dans le sérieux comme dans la déconnade, c’est peut être ça l’esprit DeMarco.

En bonus, cette petite vidéo dans laquelle lui et ses musicien reprennent un titre de Weezer qu’il cite comme une de ses principales influences. Rien n’est préparé, il n’ont eu qu’une demi heure et ne joue même ensemble, mais ça sonne quand même. Casquette basse l’artiste !

La photo à la une est une photo tiré de ©smilepolitely.com. Vous pouvez nous rejoindre sur Facebook et Instagram, histoire de nous encourager kwa.

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