Quentin Tarantino, tout un cinéma

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Aujourd’hui on aborde le sujet de la culture cinématographique en parlant d’un réalisateur dont je suis fan. Très fan, comme probablement la plupart d’entre vous. Je vous propose donc de me suivre dans ce doux article sur Tarantino, et d’apprécier son œuvre géniale.

Parlons d’abord de la vie de Quentin Tarantino

Le rêve de devenir acteur

Moi mes parents m’ont appelé Julien. Classique, percutant. Mais en hommage à aucun cow-boy. Quentin Tarantino lui, a connu un autre début de vie. Alors qu’il nait le 27 mars 1963 à Knoxville dans le Tenessee, sa mère qui n’a que 14 ans décide de l’appeler Quentin. L’anecdote est pour l’instant moyenne, car ça vous le saviez déjà. Mais ce que vous ne saviez peut-être pas c’est qu’elle l’a appelé comme ça en référence à Quint le personnage joué par Burt Reynolds dans la série télévisée Gunsmoke.

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Voici son faciès. Pas mal la coupe.

Oui, moi non plus je ne connais pas la série, mais ça importe peu. Sa mère quitte son père, et amène Quentin dans la banlieue de Los Angeles. Les années passent, Quentin grandit, et s’avère être plus intéressé par le cinéma que par l’école. Sa mère lui a transmis sa passion pour le cinéma, ce qui lui vaudra une affection pour les films de série B (films à faible budget qui sont diffusés en première partie de séances « deux films pour le prix d’un »), voire de série Z (films d’encore plus faibles budget, raillés pour leur qualité).

Il quitte d’ailleurs le lycée à 16 ans, pour se consacrer à des études d’art dramatique. Car son rêve c’est de devenir acteur, comme John Travolta, son idole d’alors qui cartonnait grâce à Grease et Saturday Night Fever. Sauf qu’il fallait bien se financer les études, et plutôt de que de se masturber dans sa chambre, il devient ouvreur au Pussycat Theatre, spécialisé dans le porno.

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Voici une jolie publicité d’époque pour les théâtres coquins. Crédits photo : Jericl Cat.

Un fan absolu de cinéma

Ce boulot n’est pas l’endroit idéal pour développer sa culture cinématographique, surtout qu’avec l’arrivée du magnétoscope dans les années 80 il devient très friand de VHS, qu’il dévore à longueur de journées. Alors pas plus con qu’un autre, il trouve un job en tant que vendeur de VHS dans un vidéo club de Los Angeles à partir de 84.

Pendant 5 ans il y développera sa culture cinématographique, en se gavant de films et en regardant littéralement tout ce qui se trouvait dans le vidéo club. C’est d’ailleurs pendant cette période, entre 84 et 87 qu’il tourne son premier film avec Craig Hamann, un copain de son cours de comédie. Le film s’appelle My best friend’s birthday. Ils abandonneront ce film, déçus par le résultat et par leur manque de moyens. C’est en 87 qu’il écrit le script de True Romance qu’il vend en 90 pour 50000$. De quoi mettre un peu d’argent de côté, pour à l’avenir, qui sait, réaliser son propre film…

La découverte de son goût pour la réalisation

Quentin Tarantino aime beaucoup écrire. Mais c’est une vraie souffrance de ne pas pouvoir maîtriser parfaitement la mise en scène de son joli bébé. Il a un peu en travers de la gorge le fait qu’Oliver Stone ait retouché allègrement le scénario du film Tueurs nés, dont il avait écrit le script. La solution est toute trouvée, il doit réaliser lui-même son film. Qu’à cela ne tienne, il écrit donc le scénario de Reservoir Dogs.

Et c’est là que la vie est bien faite. Alors qu’il bosse chez CineTel, une compagnie de production Hollywoodienne, il rencontre Lawrence Bender. Ce même homme qui produira tous ses films. Et qui lui présentera Harvey Keitel.

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Vous m’reconnaissez ?

Mais si, je suis sûr que vous voyez qui c’est. Une photo supplémentaire risque de vous en convaincre.

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Mais siiiiii, c’est moi !

Voilà, c’est bien l’acteur qui a joué Mr White dans Reservoir Dogs. Il a tellement aimé le script qu’il a accepté de jouer dans ce film avec très peu de moyens, et d’enrôler d’autres acteurs aux noms clinquants tels que Tim Roth, Chris Penn, Michael Madsen ou Steve Buscemi.

La consécration, ça fait plaisir

Le film sort en 1991, et est très bien reçu par le public et la critique. Il reçoit un tel accueil qu’il est rentable à plus de 1800% à la faveur de son faible budget et des 22 millions de dollars qu’il a rapporté dans le monde entier. Quentin Tarantino se fait donc connaître avec ce premier film prometteur.

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L’affiche de Reservoir Dogs

La machine infernale est lancée. Il crée sa boite de production avec son pote Bender, qu’il nomme A Band Apart (référence à Bande à part de Godard), et écrit le scénario de Pulp Fiction. Il le sort en 1994, et reçoit un succès encore plus chaleureux que pour Reservoir Dogs. Il gagne : La palme d’or du Festival de Cannes en 1994, l’Oscar du meilleur scénario en 1995, le Golden Globes du meilleur scénario la même année, et 23 autres prix.  Le succès commercial et public est tout aussi affectueux, puisque Pulp Fiction rapporte plus de 213 millions de dollars. De quoi s’acheter 426 millions de malabars.

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Et la célèbre affiche de Pulp Fiction, qu’on retrouve sur de nombreuses serviettes de plage sur tous les marchés de bords de mer en été.

Il revient en 1997 avec Jackie Brown, qui n’aura pas le même retentissement que ses deux premiers films. Alors qu’il était devenu la coqueluche (mot issu du vocabulaire journalistique pas très joli) d’Hollywood, il se fait oublier. Pour revenir en 2003 avec Kill Bill : Volume 1, suivi en 2004 de Kill Bill : Volume 2. Il retrouve alors l’amour de son public avec ces deux opus. Je vais pas vous refaire toute sa filmographie jusqu’à aujourd’hui, même si elle est courte. Vous connaissez très probablement ses 4 derniers films, et leur succès au box-office.

Quentin Tarantino ne bat pas des records de productivité, son score étant de 7 films réalisées en 25 ans. Pas le même ratio que Woody Allen quoi. Mais c’est pas pour autant qu’il ne glande rien : il a écrit le scénario de Une nuit en enfer de Robert Rodriguez, réalisé une scène dans Sin City de ce même Robert, et a bossé pour la télé en réalisant des épisodes pour les séries Les Experts et Urgences.

Alors pourquoi je vous parle de Quentin Tarantino ? Juste pour faire sa biographie façon Wikipédia ? Non pas vraiment, je vous crois assez débrouillards pour taper « Quentin Tarantino wikipedia » sur Google, et cliquer sur le premier lien. Croyez-moi, vous en êtes capables. Non, j’en parle car un jour un ami proche m’a dit qu’il avait adoré le film Kingsman, et qu’il avait trouvé ça Tarantinesque. Tarantino quoi ? Tu veux dire quoi par là ?

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Non mais sans déconner ?

Note de Hans : On se demande bien qui est cet inculte d’ami proche…

Le cinéma Tarantinesque

Comme vous vous y attendez surement, ce terme clownesque est souvent mal utilisé et caricatural. Je vous propose de faire une petite liste des éléments à respecter pour mériter ce nom.

Des personnages nombreux et aux traits grossiers

Les personnages d’un film Tarantinesque doivent être bizarres et issus des films de genre que Quentin Tarantino aime beaucoup. Des personnages bien kitchs et reconnaissable dès le premier coup d’œil. Il se base sur des clichés, avec le dealer, le flic, le trafiquant d’arme, l’esclave black, pour construire des personnages complexes, à géométrie variable puisqu’on en découvre un peu plus sur eux à mesure que le film se déroule devant nos yeux.

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Le cliché de l’esclave black joué par un acteur black. C’est une hérésie.

En plus de ça les personnages doivent être nombreux, et ne pas forcément mettre en avant un seul héro. Bon, sauf pour Kill Bill. On a donc un joyeux bordel qui se projette à l’écran, et la caméra en profite pour se focaliser sur l’histoire de chacun des personnages, pour faire avancer l’histoire.
D’ailleurs Robert Rodriguez emploie le même système dans Sin City, avec sa ribambelle de personnages tous plus kitchs et badass les uns que les autres.

De la violence bien épaisse

Je dois vous avouer que je ne trouve pas grand-chose à redire au premier critère sur les personnages. Mais ce deuxième critère me fait par contre un peu plus grincer des dents. Pour faire un bon film Tarantinesque, il faut de la violence. Nous allons voir que ce n’est pas exactement vrai.

Quentin Tarantino traite la violence avec légèreté, et essaie de se détacher au plus possible de cette violence en faisant comprendre que ce n’est que du cinéma. Ce n’est pas parce qu’il aime mettre en scène cette violence pour servir ses films qu’il est un pervers malsain aux pulsions violentes. La violence est nécessaire dans ses histoires, mais il la montre avec le recul qu’implique l’écran de cinéma.

Il suffit pour s’en convaincre d’observer la relation entre ses personnages et la mort. Que ce soit dans Inglourious Basterds, Kill Bill ou Pulp Fiction, les personnages donnent l’impression que la mort n’est qu’anecdotique. Elle ne les fait pas frémir. Ce qui est extrêmement drôle, car ce décalage provoque en nous une incompréhension comique.

Rappelez-vous la scène dans Pulp Fiction où Vincent Vega tue par inadvertance le pauvre Marvin (qu’on ne connaissait pas, on ne savait pas ce qu’il foutait là !), à cause d’un dos d’âne qui lui a fait riper le doigt sur la gâchette de son flingue. La balle a alors atterri en pleine tête du malheureux gars. Tel un hasard. Et c’est fabuleux.

D’ailleurs les morts sont volontairement exagérées, avec des gerbes incroyables de sang qui s’échappent des corps décapités. Comme s’il nous disait «On est au cinéma les gars, soyez pas chiants, et laissez-moi vous conter mon histoire ». Pour le plaisir, un petit extrait de Kill Bill.

Par contre quand il s’agit d’exprimer une vraie violence, Quentin Tarantino se sert de la tension que peut inspirer le cinéma, et se montre pudique. En effet il s’appuie sur le non-dit et le suggéré, et laisse au spectateur le soin de s’imaginer la scène. En témoigne la scène dans Reservoir Dogs, quand Mr Blonde coupe l’oreille du flic. Le voir faire aurait été dur à avaler. Voir la caméra s’élever au plafond et détourner le regard provoque encore plus d’effroi. On entend le flic gémir, et on s’imagine le sang couler.

On a donc affaire à une violence très stylisée et chorégraphiée, et qui à l’instar de la musique, fait partie des outils esthétiques dont se sert Quentin Tarantino pour inspirer une ambiance. Elle est donc bien plus complexe que ce que la caricature veut bien nous laisser penser. On est loin de la baston ultra-violente qu’on s’imagine quand on parle de scène Tarantinesque.

Des dialogues reconnaissables

Pour avoir un film bien Tarantinesque il faut des dialogues. Beaucoup de dialogues. Longs, et qui traitent de tout et rien. Ça doit parler de sujets banals, et faire rire aux éclats car c’est complètement décalé avec la scène dans laquelle le dialogue se passe. Genre un dealer qui est en train de ligoter un mec et qui demande à son complice la marque de son gel douche, car il trouve qu’il sent bon. C’est facile et à la portée de tous.

Note de Hans : Alors, je sais pas vous, mais moi il me semble qu’on dit « de sujets banaux« …

Un aspect que le grand public associe aux dialogues Tarantinesques est l’omniprésence de références à la pop culture dans les dialogues. On se souvient tous du monologue du personnage joué par Quentin Tarantino dans Reservoir Dogs, où il explique son interprétation de Like A Virgin de Madonna. C’est excellent, rien à dire. Très drôle, et ça permet d’installer une ambiance au film.

« Cette chanson, Like a Virgin, tu veux que je te dise de quoi ça parle ? Ça parle d’une fille qui est mordue pour un mec qui a une super queue. Cette chanson, c’est une métaphore sur les grosses queues. »

En réalité la caractéristique des dialogues de Quentin Tarantino n’est pas leur longueur, ou leur quantité. Mais par le fait qu’ils ont été écrits par lui, simplement (#pasfaux). Il est logiquement le seul à pouvoir insuffler ce rythme à ses dialogues, et à savoir faire partir ses personnages dans des conversations délirantes n’ayant aucun rapport avec la scène. Mais ce ne sont pas des dialogues gratuits. Ils ne sont pas seulement des gimmicks pour satisfaire ses fans, mais des briques qui permettent au spectateur de se créer une image globale et complexe des personnages et de l’intrigue.

Un petit bilan s’impose

J’espère maintenant que si vous faisiez partie des gens qui voyaient des films Tarantinesques partout au box office, vous être convaincus que c’est une sacrée erreur. C’est presque un sacrilège. Ce qui définit vraiment Quentin Tarantino dans son cinéma c’est la construction de ses films. Il les construit comme il s’exprimerait dans la vie pour expliquer une histoire à ses potes. Ça crée un rythme dynamique et tient en haleine le spectateur.

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Et moi je vous tiens en haleine avec cette photo de Quentin Tarantino. Crédits : Cinefeel

Il s’appuie sur une déconstruction des codes traditionnels et compte sur la culture cinématographique de plus en plus grande du public qui est capable de s’adapter. Il multiplie alors les points de vue, ce qui amène son film à offrir une vision globale de l’action.

Si vous voulez en savoir plus sur le cinéma de Quentin Tarantino, courrez lire cet article, il vaut le détour.

A plus tard pour de nouvelles aventures, nous reviendrons sur ce sujet, c’est promis, il y a tellement à dire sur l’œuvre de ce mec.

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Photo à la une by Amanda Demme / New York Magazine.

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